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Seine, Rhin, Tamise, Tibre… Les fleuves européens massivement pollués par les microplastiques

23/04/2025

Seine, Rhin, Tamise, Tibre… Les fleuves européens massivement pollués par les microplastiques

Une expédition scientifique d'ampleur a révélé qu'un grand nombre de fleuves européens étaient envahis de microplastiques. Crédits : Unsplash.

Des résultats glaçants. De la Seine au Rhône, en passant par la Tamise ou le Tibre, les fleuves sont noyés sous une marée de microplastiques. Ce constat est le fruit de quatorze études menées par une vaste coalition scientifique. Novethic vous propose cette semaine un "pas de côté" sur l’actualité.

Certains flottent à la surface, d’autres se font plus discrets au fond des lits des cours d’eau, mais ils sont bien là : les microplastiques. Cette pollution invisible à l’œil nu a envahi un grand nombre de nos fleuves européens, de la Seine en France à l’Elbe en Allemagne, en passant par l’Èbre en Espagne ou le Tibre en Italie. Ce constat est le fruit d’une campagne scientifique d’envergure, "Tara Microplastiques", impliquant une quarantaine de chimistes, biologistes et physiciens de 19 laboratoires de recherche, avec le soutien de la Fondation Tara Ocean. Leurs résultats ont été publiés simultanément le 7 avril dernier dans un numéro spécial de la revue Environmental Science and Pollution Research.

Au total, neuf fleuves européens ont été passés au crible avec, à chaque fois, une même méthode : un travail minutieux de recueil et d’analyse des 2 700 échantillons prélevés à l’embouchure des fleuves, puis en remontant les cours d’eau jusqu’à la première grande ville. Résultat : "Nous avons retrouvé des microplastiques dans tous les prélèvements. Tous les fleuves sont pollués par les microplastiques. Nous faisons face à une pollution majeure", rapporte Jean-François Ghiglione, directeur scientifique de la mission et chercheur au CNRS.

Une menace sous-estimée

Les scientifiques divisent les microplastiques en deux catégories. Il y a, d’un côté, les "grands" microplastiques que l’on peut distinguer à l’œil nu car ils mesurent entre 500 micromètres et 5 mm, et de l’autre, les "petits" microplastiques invisibles, entre 25 micromètres et 500 micromètres. Ils sont partout autour de nous, depuis les fibres de textiles synthétiques ou les bouchons des bouteilles en plastique, en passant par les granulés plastiques industriels servant à la fabrication d’objets en plastique.

En moyenne, l’analyse des échantillons a révélé la présence de trois microplastiques par mètre cube d’eau. Cela signifie qu’un fleuve comme la Seine en charrie 900 par seconde. Ces données sont comparables à celles collectées dans d’autres régions du monde, mais nettement inférieures aux niveaux relevés dans les cours d’eau les plus pollués du monde, qui ne sont autres que le Mékong, le Gange, l’Amour, l’Indus ou encore le Nil, et qui peuvent atteindre jusqu’à 40 particules par mètre cube. Les scientifiques ont toutefois décelé une nouveauté qui les a surpris : "La masse des petits microplastiques, ceux qu’on ne voit pas à l’œil nu, est plus importante que celle de ceux qu’on voit", note Jean-François Ghiglione.

Or, cette présence des microplastiques dans les fleuves représente une menace pour cet écosystème, mais également pour les humains. "Contrairement aux grands microplastiques qui flottent et sont prélevés en surface, les invisibles sont répartis sur toute la colonne d’eau et impactent toute la chaîne alimentaire, avec des effets hormonaux qui perturbent la reproduction des animaux, par exemple", explique Alexandra Ter Halle, chercheuse au CNRS. Mais le plus inquiétant est que les résultats ont détecté la présence d’une bactérie qui se développe sur ces plastiques, pathogène pour l’être humain.

Vers un durcissement de la législation européenne

Hasard du calendrier, la Commission européenne, les eurodéputés et les États membres sont parvenus à un compromis dans la nuit du mardi 8 au mercredi 9 avril, dans le but de durcir la législation contre la pollution aux microplastiques, et notamment d'endiguer celle liée aux fuites de granulés de plastique, également appelés "larmes de sirène".

Dans la pratique, les industriels qui produisent, transportent ou transforment ces granulés devront établir des plans d'évaluation des risques afin de contenir les fuites éventuelles et engager rapidement des opérations de nettoyage le cas échéant. Les grandes entreprises qui produisent ou transportent plus de 1 500 tonnes de microplastiques par an devront régulièrement obtenir une certification auprès d'un organisme indépendant et risqueront des sanctions en cas d'insuffisance. Pour les petites entreprises, ces obligations seront allégées. Celles qui produisent plus de 1 500 tonnes devront obtenir une certification unique dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur de la loi, celles qui produisent moins n'auront qu'une simple auto-déclaration à remplir.

Du côté des associations environnementales, cet accord "Zero Pellet Loss" est une avancée "ambitieuse pour réduire une pollution évitable". Mais les "délais" et les "exemptions arbitraires" pour les petites entreprises "risquent de limiter l'impact" de la loi, regrette Amy Youngman, de l'Environmental Investigation Agency (EIA), l'une de ces ONG.

novethic

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