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Les entrées de ville commerciales : un potentiel de 1,6 million de logements à créer
11/06/2025

© Scet, Analyses & traitement data et géomatique, 2025 et Jean-Louis Zimmermann CC BY 2.0
1,6 million de logements à créer, dont plus de 120.000 à court terme, 15.000 hectares de foncier économique, 10.000 hectares de zones renaturées et d'espaces verts… Pour la première fois, le potentiel des entrées de ville commerciales a été identifié dans le cadre d'un baromètre présenté le 4 juin 2025 par Icade et la Scet. Ces 3.838 sites représentent au total un potentiel de transformation de 80.000 hectares. Ces zones souvent qualifiées par le terme "France moche" sont pourtant appréciées autant par les décideurs locaux que par les Français…
Les entrées de ville correspondent à 80.000 hectares de foncier à transformer et à un potentiel de 1,6 million de logements. C'est ce qu'indique la première édition du baromètre des entrées de ville commerciales, réalisée par Icade et la Scet. "C'est le premier exercice de ce type mené en France, avec une telle exhaustivité", a précisé Christophe Lasnier, directeur général adjoint de la Scet, lors de la présentation du baromètre, mercredi 4 juin. Celui-ci a été réalisé à partir d'un recensement de ces sites (les entrées de ville de plus d'un hectare) et d'une enquête menée auprès de 1.000 personnes représentatives de la population française. 249 décideurs (collectivités territoriales, professionnels du commerce, de l'aménagement et de l'immobilier) ont également été interrogés sur le potentiel de ces zones en 2025.
3.838 entrées de ville de plus d'un hectare
Au total, le baromètre identifie 3.838 entrées de ville de plus d'un hectare, intégrant les sites identifiés par le gouvernement dans le cadre du programme expérimental de transformation de ces zones lancé en septembre 2023 (voir notre article du 29 mars 2024). Trois catégories principales sont mises en avant : les sites de plus de 15 hectares qui représentent 80% des surfaces d'entrées de ville (pour une surface cumulée de 65.000 hectares) et 34% des sites ; les entrées de ville de 3 à 15 hectares, représentant 40% des sites recensés et correspondant au vivier de projets le plus important pouvant accueillir des activités diversifiées ; enfin, les sites de 1 à 3 hectares, qui ne représentent que 2% du potentiel foncier (26% des sites) mais correspondent à un vivier de projets potentiels (plus de 1.000 projets partout en France) pouvant être menés à très court terme.
"Ce sont 3.838 sites, plus de 80.000 hectares, soit l'équivalent de 117.000 terrains de football, énumère Christophe Lasnier, c'est une surface considérable pour la transformation des territoires et de la France à l'heure de la sobriété foncière".
Une "France moche" appréciée
Si globalement, ces sites sont répartis de manière homogène sur le territoire, certaines régions en concentrent un grand nombre : l'Auvergne-Rhône-Alpes (481 sites), les Hauts-de-France (403), la Nouvelle-Aquitaine (383) et le Grand Est (383).
Autre constat du baromètre : ces sites sont appréciés à la fois par les décideurs locaux - qui sont 69% à les considérer comme dynamiques ou très dynamiques, notamment par leur simplicité d'accès en voiture et de stationnement, la présence d'enseignes nationales et/ou internationales, la diversité et la complémentarité des commerces - et par les Français. Ils concentrent 72% des dépenses des Français et 69% des sondés déclarent s'y rendre au moins une fois par mois. Ils y apprécient notamment la diversité des commerces et la facilité d'accès. Un attrait qu'avait déjà permis de constater la grande consultation(Lien sortant, nouvelle fenêtre) lancée fin 2024 par la Banque des Territoires avec Make.org.
"On a beaucoup entendu parler de la 'France moche' mais cela reste des espaces qui fonctionnent et qui sont appréciés et les acteurs souhaitent les faire évoluer", souligne Christophe Lasnier. Car certains points noirs sont décelés. Ils relèvent pour les décideurs comme pour les Français du manque d'espaces verts. Les Français se plaignent aussi du monde sur place et du bruit, et les décideurs des difficultés de circulation en mobilités douces.
Une priorité aux logements non partagée par les décideurs locaux
89% des décideurs veulent donc les faire évoluer, vers plus d'espaces verts et de nature, une meilleure qualité architecturale des bâtiments et une meilleure desserte. De leur côté, les Français considèrent la construction de logements dans ces entrées de ville comme prioritaire ou importante pour le prochain mandat municipal (64%), une proportion d'autant plus forte chez les plus jeunes (77% pour les moins de 35 ans). 26% des Français disent qu'ils seraient prêts à y habiter (40% pour les moins de 35 ans). Mais cette priorité n'est pour le moment pas partagée par les décideurs locaux, qui appréhendent de façon très hétérogène l'introduction d'une mixité programmatique dans les entrées de ville commerciales. De nombreux freins sont aussi identifiés par les décideurs pour se lancer dans de tels projets de transformation : la capacité à porter le projet de transformation sur le temps long (55%), l'équilibre économique des projets et le nombre et la diversité des propriétaires (49%) et le risque de concurrence avec le centre-ville (45%).
Quatre objectifs pour ces zones
Le baromètre estime que la transformation de ces entrées de ville permettrait d'atteindre quatre objectifs : la création de logements (1,6 million de logements à créer, soit l'équivalent et même plus que la ville de Paris, dont 123.211 à court terme dans les sites inférieurs à 3 ha, 336.736 à horizon 15 ans sur les sites de 3 à 5 ha et plus de 1 million à horizon 20 ou 25 ans sur les grands sites), le développement économique, en faisant émerger un potentiel de 15.000 hectares de foncier dédié à l'économie productive (la soft industrie, la logistique du dernier kilomètre), le commerce, en accompagnant la transformation et la modernisation des actifs commerciaux existants, et enfin la renaturation, en générant un potentiel de désimperméabilisation et de renaturation de 10.000 hectares, équivalent encore une fois à la ville de Paris et à la moitié de la surface moyenne artificialisée annuelle…
Définir une vision de long terme en complémentarité avec le centre-ville
Forts de ces données, Icade et la Scet identifient quatre priorités d'actions pour s'attaquer à la transformation de ces zones, dont la première est la réussite de la mise en œuvre des projets sur les sites de petite taille dès le prochain mandat municipal 2026-2032. Il s'agirait de cartographier les sites de moins de 3 ha et d'initier un dialogue public-privé pour chacun d'entre eux, afin d'identifier les sites prioritaires et de lancer les études de faisabilité. Autre priorité : structurer une gouvernance robuste et pérenne pour porter la transformation des grands sites sur le temps long (inscrire l'évolution des entrées de ville commerciales dans les documents de planification tels que Scot ou PLUI, initier les études de cadrage stratégique associant collectivités, aménageurs, propriétaires et enseignes commerciales, aborder les macros-équilibres financiers). L'idée d'identifier les opportunités foncières pour accueillir de nouvelles activités économiques fait aussi partie du plan, en favorisant les entreprises et filières stratégiques du territoire et en profitant de la réussite d'une ou deux premières opérations pour produire un effet d'entrainement. Enfin, la réussite de l'alliance des acteurs publics et privés est considérée comme une condition sine qua non de la transformation des entrées de ville. Il s'agit ainsi de définir une vision de long terme du projet, de s'inscrire en complémentarité avec le centre-ville, pour éviter les effets de concurrence, et de créer un consensus politique et territorial.