« Le matériau naturel le plus résistant » : des routes, maisons et meubles en coquilles d’huîtres

Colas, entreprise du BTP, utilise dans différents projets des coquilles d’huîtres. | COLAS

Construction, revêtement, artisanat… La coquille de ce mollusque marin, considérée comme un déchet, est utilisée comme amendement par des entreprises du bâtiment et de l’artisanat.

Au bord de l’étang de Thau, le village de Bouzigues (Hérault) est réputé pour la qualité de ses huîtres. De nombreuses gargotes proposent d’ailleurs aux gourmands d’en déguster les pieds dans l’eau. Problème, les 10 000 tonnes de coquillages produits par an génèrent en moyenne 8 000 tonnes de déchets.

La coquille d’huître, un déchet qui peut être valorisé. | MALAKIO

Alors l’agglomération a demandé en 2020 à Colas, leader mondial de la construction, de l’entretien et de la maintenance des infrastructures de transport (filiale de Bouygues), qui possède une agence à Sète, de trouver une idée pour réutiliser ces déchets, comme nous l’explique son responsable local Romain Caraï.«   Nous avons réfléchi, investi en recherche et développement, mené des essais pendant plusieurs mois dans notre laboratoire et finalement, nous avons mis au point un revêtement à base de sable de coquilles d’huîtres que nous utilisons à Sète, Bouzigues, Narbonne et Leucate sur des chemins piétons, des pistes cyclables et des parkings. »

« En éprouver les possibilités »

Un béton d’un nouveau genre, réalisé à partir de matériaux biosourcés et renouvelables, qui coche toutes les cases du circuit court, de l’économie circulaire, du bas carbone et du made in France.

À Montpellier, le projet immobilier Terra Ostrea va introduire dans ses matériaux des coquilles d’huîtres. | NBJ ARCHITECTES

D’autres projets similaires fleurissent le long des côtes. À Montpellier, un programme de construction de logements sociaux baptisé « Terra Ostrea » intègre également des coquilles d’huîtres.  Elles sont considérées comme un éco-déchet, nous proposons donc d’en éprouver les possibilités d’usage constructif », explique l’architecte du projet Jacques Brion.

Ces matériaux suscitent de l’intérêt au-delà de l’Occitanie. À Rennes (Ille-et-Vilaine), l’entreprise Ostrea crée des matériaux haute performance à base de coquilles d’huîtres, de moules et de Saint-Jacques, similaires à du marbre ou de la pierre naturelle, utilisables comme revêtement de sol, mural, ou encore pour du mobilier.

« La nacre, matériau naturel le plus résistant au monde »

Près de Nantes (Loire-Atlantique), Malakio fabrique des objets majoritairement destinés à l’hôtellerie-restauration (décoration, art de la table, mobilier, luminaires), à partir d’un composite bas carbone en coquillages revalorisés qu’elle a mis au point. Et sur la dune du Pilat (Gironde), un chemin piéton en béton de coquilles d’huîtres d’Arcachon est actuellement expérimenté.

Les coquilles d’huîtres entrent dans la composition d’un matériau composite utilisé par exemple pour fabriquer des meubles. | MALAKIO

La coquille d’huître peut-elle devenir un produit incontournable de l’aménagement du territoire ? David Grégoire, professeur des universités à l’ISA BTP au sein de l’université de Pau et des Pays de l’Adour (Pyrénées-Atlantiques), en rêve. Il étudie depuis des années les propriétés remarquables de la nacre, «  le matériau naturel le plus résistant au monde ». Lui et son équipe ont mis au point un granulat à base de coquillages broyés, compatible avec des ciments bas carbone. « Ainsi on peut faire du béton de structure performant et à faible impact environnemental, nous explique-t-il. D’un point de vue chimique, la nature travaille toujours avec les éléments les plus simples. Nous avons tout intérêt à nous en inspirer. »

Ce béton durable deviendra-t-il la norme un jour ? Pour l’instant, l’industrie du génie civil reste mesurée, mettant en avant des raisons évidentes de sécurité.

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