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Les Fabriques : un écoquartier "modèle" pour la ville méditerranéenne de demain ?
27/10/2024
L'éco-quartier "Les Fabriques", à Marseille. © Kern + Associés architectes urbanistes 2022
Alors que la Méditerranée fait partie des zones les plus sensibles face aux effets du réchauffement climatique, certains territoires tentent de s’adapter en repensant notamment l’aménagement des villes de manière plus durable. A Marseille, l’écoquartier Les Fabriques est aujourd’hui érigé en exemple à suivre par ses créateurs. Zoom avec Hélène Marliangeas, responsable communication et urbanisme transitoire à XXL Marseille – la société à l'initiative du projet.
Face au changement climatique, la transformation des villes s’impose partout en France comme un enjeu majeur. Si tous les territoires sont concernés, certaines régions sont aujourd’hui plus exposées que d’autres, à l’image de la Méditerranée qui connait des épisodes de sécheresse de plus en plus longs et fréquents.
Afin d’adapter les zones urbaines à ces phénomènes - amenés à s'intensifier ces prochaines années, des initiatives essaiment, notamment dans la métropole Aix-Marseille-Provence où l’établissement public d’aménagement Euro-méditerranée (EPA) ambitionne de développer un modèle de durabilité "applicable aux métropoles et villes du Sud de l’Europe et du bassin méditerranéen". Parmi les derniers projets sortis de terre : l’éco-quartier Les Fabriques, niché au nord de Marseille et conçu par Linkcity et UrbanEra - regroupés au sein de la société XXL Marseille. Pour mieux appréhender les contours mais aussi les limites d’un tel projet, ID a interrogé Hélène Marliangeas, responsable communication et urbanisme transitoire à XXL Marseille.
Vue du parking aérien de l'éco-quartier Les Fabriques.© Véronique Paul
A quoi ressemblait le quartier des Fabriques avant qu’il ne soit transformé en écoquartier ?
Il s’agissait d’une zone de logistique d’arrière-port dont un tiers était réservé au stockage de conteneurs. Euroméditerranée, en charge de l’achat du foncier dans ce projet, a pu acquérir les parcelles qui appartenaient aux professionnels. Des habitants résidaient également sur cette friche industrielle mais ils étaient peu nombreux - environ une cinquantaine. Le projet actuel doit, quant à lui, pouvoir accueillir 2 000 résidents d’ici 2030.
L’ambition est aussi "d’offrir un modèle de durabilité méditerranéen". Pouvez-vous préciser ce que cela signifie ?
La notion de durabilité recouvre plusieurs aspects. Mais il y a en priorité la volonté de proposer des logements adaptés au climat méditerranéen, notamment grâce à une conception bioclimatique des bâtiments. Cela doit permettre d’avoir des espaces traversants pour faciliter l’aération naturelle. L’accent est également mis sur l’aménagement des extérieurs. Tous les logements familiaux sont par exemple dotés de terrasses, loggias ou petits jardins en rez-de-chaussée.
Pour alimenter les systèmes de chauffage, vous avez également eu recours à la thalassothermie. De quoi s’agit-il concrètement ?
Ce système fonctionne sur le même principe que la géothermie, mais au lieu de puiser l’énergie dans le sol grâce à une pompe à chaleur, on utilise les calories ou frigories de l’eau de la mer pour alimenter les bâtiments en froid ou en chaud. En été, cela permet notamment d’avoir recours à un système de refroidissement naturel qui est beaucoup moins énergivore que la climatisation.
Côté biodiversité, une attention particulière a été portée à la "renaturation de la zone". A quelles difficultés avez-vous été confronté pour relever ce défi ?
Les 14 hectares de la parcelle étaient entièrement pavés de dalles en béton. Il a donc fallu repartir de zéro afin de recréer de la vie dans le sol. Pendant deux ans et demi, l’aménageur Euromediterranée a travaillé en collaboration avec le CNRS de Montpellier et la Métropole Aix-Marseille pour tester des planches avec différents mélanges de terres. Celles prélevées sur place, qui n’étaient pas en très bon état, ont été mêlées à des terres provenant de la garrigue et du maquis. Plusieurs densités de plantations, et types d’irrigation et revêtements drainants ont également été expérimentés.
En termes de construction, la part de neuf est plus importante que la réhabilitation d’anciens ouvrages. Comment avez-vous dès lors réussi à minimiser l’empreinte carbone de ce poste ?
Un travail a été fait sur l’utilisation de bétons bas carbone et le réemploi de matériaux même si on reconnait que cela reste encore difficile. Au-delà du manque de structuration de la filière, les clients ne sont pas toujours volontaires. Pour réduire notre bilan carbone, nous avons tout de même réussi à développer une solution pour le traitement des terres. Brézillon, a installé un écocentre éphémère sur le chantier pour traiter et réemployer sur place d’importants volumes.
De manière globale, les écoquartiers ont pour vocation de limiter l’usage de la voiture. Quelle est sa place au sein des Fabriques ?
Dès le départ, il y avait la volonté d’avoir un quartier majoritairement piéton, traversé uniquement par deux axes où la circulation automobile est possible. Le nombre de places de stationnement est également limité sur la voie. Un tiers ont été réalisés en silo (environ 1220 places répartis sur deux parkings). Le reste est réservé pour la livraison ou des stationnements éphémères.
Quel a été l’accueil des habitants face à un tel projet ?
L’écoquartier étant situé dans une zone assez pauvre, il est clair que ce projet ne fait pas partie de leurs préoccupations majeures. A ce jour, il n’y a pas d’emballement mais pas non plus d’oppositions particulières. 463 logements ont déjà été livrés depuis 2023. Un travail est mené afin que les habitants s’approprient peu à peu les lieux, ainsi que ceux qui y travaillent ou y passent pour le loisir. L’objectif est d’avoir un quartier ouvert avec une mixité d’usages, destinés à tous et toutes.