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Austérité budgétaire : la société civile alerte sur les reculs sociaux et environnementaux
12/05/2025

La société civile appelle à sortir de l'austérité budgétaire pour éviter la crise sociale. Crédit : BASTIEN OHIER - Hans Lucas via AFP
Syndicats, ONG, entreprises de l'ESS... Tous alertent depuis plusieurs semaines face à la crise sociale et environnementale qui s'ancre en France, alors que les budgets dédiés à l'intérêt général fondent. La société civile appelle le gouvernement à passer à l'action pour préserver "le pouvoir de vivre" des citoyens.
L'inquiétude est palpable chez les acteurs français de la société civile. Alors que s'empilent les difficultés sociales, que ce soit en matière d'accès au logement ou aux soins, de précarité alimentaire, de chômage, d'inégalités ou encore de vulnérabilité face à la crise environnementale, ils sont de plus en plus nombreux à alerter sur la crise globale qui se dessine en France. Associations, syndicats, mutuelles et coopératives, mais aussi entreprises de l'économie sociale et solidaire, multiplient ces dernières semaines les cris d'alarme face à la politique d'austérité budgétaire mise en place par le gouvernement et à l'accumulation des reculs normatifs ces derniers mois.
Ces organisations qui œuvrent au quotidien pour des missions d'intérêt général et citoyennes, réunies au sein du Pacte du pouvoir de vivre, "constatent avec inquiétude une multiplication des attaques contre certains droits sociaux et piliers de notre protection sociale" expliquent-elles dans un communiqué publié le 6 mai. Elles dénoncent notamment "l'affaiblissement des espaces de dialogue démocratique", "l'immobilisme dans la lutte contre les inégalités et la pauvreté" et les "importants reculs sur la transition écologique", qui impactent dès aujourd'hui la vie des citoyens.
Simplification et austérité au cœur de la crise sociale
Au cœur des inquiétudes, les réformes menées ces derniers mois au nom de la simplification et de l'austérité budgétaire, qui affaiblissent les droits sociaux. Les différentes réformes du chômage et du RSA ces dernières années ont par exemple conduit à une précarisation constante des citoyens concernés. Comme le soulignait en avril un rapport du Comité d'évaluation de la réforme de l'assurance chômage, la réforme de 2019 a ainsi conduit à une baisse de près de 20% des revenus des demandeurs d'emplois, sans contribuer à un retour durable à l'emploi, accélérant ainsi la précarité des populations. Avec les nouvelles réformes envisagées par le gouvernement, la situation pourrait encore s'aggraver. Mais l'austérité budgétaire affecte désormais tous les secteurs : santé, université, culture, territoires... Une politique qui contribue à précariser l'ensemble de la société, au point qu'il y a quelques semaines, l'Observatoire des inégalités dénonçait la "montée lente de la pauvreté" dans le pays.
Or face à cette crise, les organisations de la société civile sont plus que jamais démunies. Les structures associatives ou celles issues de l'Economie sociale et solidaire (ESS), qui ont vu elles aussi leurs subventions baisser, peinent désormais à prendre en charge les missions d'intérêt général qu'elles assuraient jusqu'ici : insertion, lutte contre la précarité, aide au retour à l'emploi, protection environnementale... Il y a quelques jours, lors de la conférence sur le financement des acteurs de l'ESS, le ministre de l'Economie Eric Lombard a ainsi tenté de préparer les acteurs du secteur à de nouvelles coupes budgétaires. Ces derniers alertent pourtant sur leurs difficultés pointant notamment un risque de suppression de près de 400 000 emplois. "On entend que l'“on nous donnerait déjà 16 milliards d’euros”. Cette musique sonne particulièrement faux. Le gouvernement ne nous donne pas 16 milliards, il paie l’ensemble des actions que nous menons pour faire tenir la société et la démocratie. Ce qui est, finalement, assez peu cher payé", s'indigne ainsi Bastien Sibille, secrétaire général de Coop Fr, qui représente les entreprises coopératives françaises.
"Porter un autre projet de société"
Sous couvert de simplification, le gouvernement envisage même ces dernières semaines la suppression pure et simple des instances représentatives de l'ESS, qui pèse près de 10% du PIB et 15% des emplois, et plus encore dans les secteurs de l'aide sociale ou de l'intérêt général. "Si ce kilomètre de l’intérêt général est affaibli, alors il affaiblira aussi les capacités de la nation à s’unir à un moment où ses intérêts sont mis en cause par d’autres puissances, d’autres intérêts économiques étrangers", analyse Benoit Hamon, ex-ministre de l'ESS, désormais président d'ESS France. Même son de cloche du côté du monde associatif, qui pâtit lui aussi de la baisse des aides publiques, mais aussi de la diminution des crédits des Agences de l'Etat, dont ils sont des partenaires privilégiés.
Pour éviter l'enlisement, la société civile demande ainsi au gouvernement de changer de stratégie, en mettant en place "des solutions concrètes et à portée de main" pour répondre aux besoins des citoyens : encadrement des loyers, chèque énergie pour le logement, leasing social, moratoire sur les réformes du chômage ou du RSA, mise en place de mesures facilitant l'accès au soin... Une centaine de personnalités réunies autour du Réseau Action Climat appellent également le gouvernement à s'engager "pour une transition écologique qui n'oublie personne", notamment via des réformes fiscales visant à taxer les plus pollueurs et les plus riches afin de financer l'effort collectif. Des propositions qui ont pour objectif de "porter un autre projet de société, qui ne sacrifie ni les plus vulnérables ni l'environnement", grâce à "davantage de cohérence budgétaire et de justice fiscale". Reste à savoir si l'appel sera entendu, alors que le gouvernement reste focalisé sur la réduction des dépenses.