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Océans : l'Unesco en dessine un panorama peu rassurant

16/06/2024

Océans : l'Unesco en dessine un panorama peu rassurant

L'Unesco évalue la pollution plastique à plus de 170 000 milliards d'objets et particules en flottaison.    © Richard Carey

Dans son second rapport en deux ans sur le sujet, l'Unesco souligne à quel point l'état des océans continue de décliner sous l'effet du réchauffement climatique et des activités humaines.

« Température, acidification, niveau de la mer : tous les signaux sont au rouge. » C'est la conclusion retenue par Audrey Azoulay, directrice générale de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation et la culture (Unesco) et ancienne ministre française de la Culture, à la lecture d'un document publié par l'organisation onusienne, le 3 juin. Ce rapport (1) sur « l'état des océans » rassemble une vingtaine d'articles scientifiques dressant un état des connaissances en la matière. Il rebondit, en cela, sur une première analyse parue en 2022, lancée à la suite de l'ouverture, l'année précédente, de la « Décennie des Nations unies pour les sciences océaniques au service du développement durable ».

Les océans bouillonnent

Quel que soit le point de vue, les nouvelles ne sont pas réjouissantes. S'agissant du réchauffement climatique, « les océans se réchauffent actuellement deux fois plus vite qu'il y a vingt ans et, à cet égard, l'année 2023 a connu l'une des plus fortes augmentations jamais observées depuis les années 1950 », soulignent les chercheurs de la Commission intergouvernementale sur l'océanographie (IOC) de l'Unesco. En moyenne, selon le Service sur le changement climatique du programme européen Copernicus (C3S), la température moyenne à la surface des océans a effectivement bondi de 0,2 °C sur l'année 2023. Tant et si bien qu'en février dernier, celle-ci avait atteint 21 °C – un record historique.

Les températures océaniques ont déjà augmenté de 1,45 °C en moyenne et sont nettement supérieures à 2 °C dans les "points chauds"

Commission intergouvernementale sur l'océanographie de l'Unesco

« Par rapport aux niveaux préindustriels, les températures océaniques ont déjà augmenté de 1,45 °C en moyenne et sont nettement supérieures à 2 °C dans les "points chauds", tels que la mer Méditerranée, l'océan Atlantique tropical et l'océan Austral. » Résultat : le rythme moyen d'élévation du niveau de la mer, à l'échelle mondiale, est passé de 2,1 millimètres par an dans les années 1990 à 4,7 millimètres par an, entre 2013 et 2022, pour atteindre une hausse de 9 centimètres depuis 1990.

Désoxygénation et acidification

Sur le plan chimique, l'IOC estime dans son rapport que les océans ont perdu environ 2 % de leur dioxygène (O2), notamment en raison de leur eutrophisation. Pour rappel, cette accumulation de nutriments azotés et phosphorés, issus des activités agricoles et industrielles, puis transportés dans les eaux usées ou par le ruissellement des précipitations, favorise la prolifération d'algues phytoplanctoniques, ensuite décomposées par des bactéries nécessitant de grandes quantités d'oxygène. L'hypoxie qui en résulte impacte alors tous les autres êtres vivants qui en dépendent. « Dans les zones côtières, particulièrement touchées par ce phénomène, les espèces se livrent à une véritable lutte pour la captation de l'oxygène : près de 500 "zones mortes", c'est-à-dire presque dépourvues de vie marine en raison de la baisse d'oxygène, ont été identifiées », atteste le rapport.

9 cm - C'est l'élévation du niveau de la mer à l'échelle mondiale depuis 1990.

Cette désoxygénation s'accompagne également d'une acidification, induite par une concentration grandissante de dioxyde de carbone (CO2) atmosphérique dissous (ou stocké) dans les océans. Acidification qui est « en augmentation de 30 % depuis l'ère préindustrielle » et qui est en passe d'atteindre 170 % d'ici à 2100. « Alors qu'en haute mer, l'acidité est en augmentation constante, les eaux côtières connaissent de fortes oscillations entre des taux d'acidité faibles et élevés, qui entraînent l'extinction massive de jeunes générations d'animaux et de plantes trop fragiles pour survivre », explique l'IOC. Et ce, sans compter la pollution plastique, dont les derniers chiffres cités par l'Unesco l'évaluent à « plus de 170 000 milliards d'objets et particules en flottaison, soit entre 1,1 et 4,9 millions de tonnes ».

Forêts marines en perdition

Enfin, concernant l'état des écosystèmes, en particulier des « forêts marines » (considérées comme des puits de carbone et des refuges pour la biodiversité), l'IOC rapporte que 20 à 35 % des mangroves, herbiers marins et marais tidaux ont été perdus depuis 1970. L'Unesco regrette en cela que « près de 60 % des pays n'incluent toujours pas la restauration et la conservation des forêts marines dans leurs plans de contributions déterminées au niveau national (NDC) », établis tous les cinq ans par les pays signataires de l'Accord de Paris. En contrechamp, les prélèvements par les activités de pêche et la production aquacole ont atteint de nouveaux records, avec environ 218 millions de tonnes de produits de la mer consommés (par l'alimentation humaine ou animale) en 2021.

L'Unesco se félicite néanmoins du nombre de projets engagés depuis le début de la décennie « pour améliorer la connaissance et la protection des océans », lesquels totalisent environ un budget d'un milliard de dollars. Avec comme premier résultat concret, l'expansion de la cartographie des fonds marins, dont les trois quarts restaient inexplorés. « Depuis 2022, 5,4 millions de kilomètres carrés de nouvelles données ont été produites, soit une surface équivalente à deux fois la superficie de l'Argentine. »

1. Télécharger le rapport

Félix Gouty: / actu-environnement

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