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PFAS : les analyses des rejets aqueux des ICPE questionnent Générations futures
03/04/2025

Au 25 mars, 2 685 ICPE avaient terminé leurs trois campagnes d'analyses obligatoires et transmis leurs résultats. © andrei310
Générations futures a décortiqué les premiers résultats de la campagne nationale de mesure des PFAS dans les rejets aqueux des ICPE. Si des PFAS sont retrouvés dans plus de la moitié des cas, les flux les plus importants sont limités à certains sites.
« Plus de la moitié - 59,6 % - des ICPE [installations classées pour la protection de l'environnement, ndlr] ayant transmis des données ont retrouvé des substances PFAS dans leurs rejets », a souligné Pauline Cervan, toxicologue de l'association Générations futures, mardi 1er avril, à l'occasion d'un point presse. L'association a décortiqué les premiers résultats de la campagne nationale d'analyses de leurs rejets aqueux qu'ont réalisées les ICPE. Cette surveillance nationale découle du plan d'actions sur les PFAS lancé en janvier 2023 par le Gouvernement et actualisé en avril 2024.
Certains exploitants d'installations soumises à autorisation devaient en effet lister les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) utilisées, produites, traitées ou rejetées par leur installation, ainsi que celles qui sont produites par dégradation. Ensuite, une campagne d'analyse devait être lancée sur les 20 PFAS de la directive Eau potable, mais également sur les PFAS identifiés par les exploitants. L'objectif ? Établir les modalités d'une surveillance pérenne de ces polluants dits éternels dans les rejets à la lumière des résultats obtenus.
Cette campagne a démarré avec du retard, notamment du fait des difficultés rencontrées pour la réalisation des analyses. « À la date du 25 mars 2025, 2 685 ICPE avaient terminé leurs trois campagnes d'analyses obligatoires et transmis leurs résultats », note Pauline Cervan.
Le nombre de sites visés a, quant à lui, évolué à la baisse. Lors de la publication de l'arrêté en juin 2023, 5 000 étaient ciblés, puis lors de l'actualisation du Plan PFAS en 2024, l'objectif était tombé à 4 000 sites et dernièrement, en 2025, une direction régionale de l'environnement (Dreal) relayait sur son site l'identification de près de 3 600 sites.
Une contamination de fond
Premier constat de l'association : la présence d'une pollution de fond. « Dans la majorité des cas, les concentrations ou quantités de PFAS mesurées dans les rejets sont faibles : inférieures à 1 microgramme par litre (µg/L), a indiqué Pauline Cervan. L'origine de la pollution la plus probable serait l'eau prélevée dans le milieu pour le besoin des process. » Autre constat : cinq sites dépassent la valeur d'émission de 25 μg/L fixée pour les rejets des ICPE dans le milieu naturel depuis le 1er janvier 2023.
Générations futures a identifié 225 sites parmi les plus contributeurs pour leurs rejets aqueux en PFAS. © Générations futures
Par ailleurs, Générations futures a souhaité mettre en lumière les sites les plus émetteurs (1) dans l'environnement par leurs rejets aqueux. En filtrant les résultats des exploitants pour retenir les plus contributeurs à la contamination, l'association a retenu 225 établissements, (2) dont treize sont particulièrement concernés. « Nous retrouvons les producteurs de PFAS : Arkema à Lyon, Chemours à Villers-Saint-Paul, Solvay à Salindres et Tavaux, constate Pauline Cervan. Mais nous avons découvert de nouveaux sites fortement émetteurs. »
L'association a ainsi identifié l'usine Finorga, à Mourenx (64), spécialisée dans la production de principes actifs pharmaceutiques. Alertée par les résultats de la campagne, l'inspection des installations classées a demandé des analyses complémentaires à l'exploitant. « Les inspecteurs ont signalé plusieurs manquements dans les analyses, relève Pauline Cervan. De plus, Finorga n'a pas recherché le TFA, alors qu'il est présent au cours du process. Il se justifie en prétextant qu'il ne l'avait pas identifié comme un PFAS. » L'industriel a réalisé une mesure de TFA près une opération de vidange de ses cuves et la récupération des rejets aqueux contaminés. Résultats : 50 mg/L de TFA retrouvés. « Nous nous demandons quelle quantité il rejetait avant qu'ils ne soient inspectés ! », réagit Pauline Cervan.
Un élargissement des PFAS obligatoirement recherchés
À l'appui de cette analyse, Générations futures demande à élargir la liste des substances à rechercher obligatoirement. « Seulement 10 sites sur 2 685 ont recherché le TFA, alors que c'est un produit de dégradation de nombreux PFAS », justifie Pauline Cervan.
Les secteurs les plus émetteurs
Lors de son examen des résultats de la campagne d'analyse, Générations futures a identifié parmi les secteurs les plus émetteurs : la synthèse de pesticides PFAS et de médicaments, le traitement de surface des métaux, des sites spécialisés dans le recyclage et le traitement des déchets, mais aussi les sites utilisateurs de mousse anti-incendie.
Point positif néanmoins : un petit nombre de sites sont responsables de la majorité des émissions. « Des actions ciblées peuvent être mises en place et aboutir à des résultats », estime la toxicologue. Générations futures appelle toutefois à la vigilance pour éviter le transfert de pollution des rejets aqueux vers des filières de traitement inadaptées à la destruction complète des PFAS (la température d'incinération doit être comprise en 1 200 et 1 400 °C). Elle rappelle que les quantités de PFAS réellement rejetées ne sont pas connues du fait de l'encadrement réglementaire qui ne les prend pas en compte ou de façon incomplète.
Elle pointe également la question de la contamination dans les rejets des stations d'épuration. Pour mémoire, une consultation a été lancée, le 27 mars dernier, sur les conditions d'une campagne de mesures des PFAS en entrée et en sortie des stations d'épuration.
1. Sites pour lesquels les rejets répondent au moins à l'un des critères suivants : flux massique supérieur à 1 g/j pour le total PFAS, concentration en total PFAS > 25 mg/L, flux massique en AOF > 500 g/J concentration en AOF > 500 g/J.
2. Télécharger la liste des 225 sites
Dorothée Laperche / actu-environnement