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Pollution, risques toxiques et d’explosion : le mauvais élève Yara veut éviter de payer la note
17/05/2025

La société Yara est redevable de 856 000 €, pour ne pas s’être mise en conformité en matière de sécurité et environnementale. | OUEST FRANCE
Un nouveau dossier occupe l’usine Yara de Montoir-de-Bretagne, en Loire-Atlantique. Critiqué pour le licenciement de 139 personnes sur ce site, vilipendé pour le non-respect de ses obligations environnementales, visé par une information judiciaire menée par un magistrat de Saint-Nazaire, le spécialiste norvégien des engrais a saisi le tribunal administratif de Nantes avec l’espoir de se soustraire à une facture de 856 000 €.
À force de se faire taper sur les doigts par la préfecture de Loire-Atlantique, le géant des engrais agricoles Yara va-t-il finir par devoir passer à la caisse ? Il fait tout pour l’éviter et espère la bienveillance du tribunal administratif de Nantes.
Depuis 2016, le groupe norvégien a reçu près de 30 mises en demeure ou sanctions financières des autorités pour son usine installée à Montoir-de-Bretagne, près de Saint-Nazaire, principalement pour des rejets atmosphériques et des questions de sécurité. La société a récemment annoncé la transformation du site pour en faire un centre de stockage, avec le licenciement de 139 personnels sur 170 à la clé, mais ça n’efface pas l’ardoise et le passif. Celui-ci est lourd.
Des astreintes non proportionnées pour la société
Depuis le début des années 2000, ce site classé Seveso seuil haut a produit près de 500 000 tonnes par an d’engrais azoté. On y a manipulé des ammonitrates, des assemblages d’azote de phosphore et de potassium. Et pendant des années, les contrôles de la Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (Dreal) ont relevé des manquements liés aux normes environnementales et à la sécurité.
Pour Yara, à force de ne pas se mettre en conformité, les astreintes ont gonflé. « La société est désormais redevable de près de 856 000 €. C’est proportionné à la gravité des faits », appuie, ce mardi 13 mai, madame le rapporteur public du tribunal administratif. Ce serait déraisonnable pour la société, qui demande l’annulation de plusieurs arrêtés préfectoraux liquidant ces astreintes.
Les mêmes produits que sur le port de Beyrouth
Si la première mise en demeure intimant Yara à réduire ses rejets date de 2011, l’État a commencé à sérieusement frapper du poing sur la table en 2019. Les services préfectoraux ont rappelé la société à ses obligations concernant les risques industriels, les rejets de polluants dans l’eau et l’air.
Pour les premiers, les services préfectoraux pointaient l’absence de mise à jour des documents relatifs aux phénomènes dangereux et de mise en sécurité. Gênant pour un endroit qui utilise les mêmes matières sensibles que l’usine AZF qui a explosé en 2001, à Toulouse. Ou plus récemment le port de Beyrouth, réduit en fumée en 2020. Craignant une catastrophe, plusieurs associations ont mené des mouvements de protestation et saisi la justice. Le parquet de Saint-Nazaire a ouvert une information judiciaire dont on attend toujours les résultats.
« Vingt-deux ans de dépassements… »
Les résultats de la qualité de l’air ont aussi de quoi inquiéter les riverains. « Plusieurs contrôles ont démontré des valeurs significatives largement supérieures aux valeurs limites », s’inquiète le rapporteur public.
« Pour apprécier le trouble à l’environnement, le préfet doit prendre du recul. Pourquoi ne pas tenir compte des études du bureau d’études Ineris et de RPI qui n’établissent aucun dépassement des limites ? », interroge l’avocat de Yara France.
« L’importance du trouble et du problème peut s’analyser par le temps. Vingt-deux ans de dépassements en l’occurrence. C’est suffisamment parlant… », rétorque le représentant de la préfecture. Réponse du tribunal dans environ un mois.