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Vélo partagé : une concurrence sérieuse pour la voiture
31/10/2023
Les abonnés des vélos électriques en location longue durée et en libre-service semblent moins utiliser leur voiture. © BENEJAM
Faciliter l'accès au vélo électrique, via une offre de service public, permet de réduire l'usage de la voiture et de développer les trajets multimodaux. Telle est la conclusion d'une récente étude de l'Association des acteurs du vélo public.
Développer l'usage du vélo constitue bel et bien un levier efficace pour réduire celui de la voiture individuelle. C'est en tout cas l'avis de la jeune Association des acteurs du vélo public (AAVP), créée en juillet 2022 par huit acteurs du marché, qui vient de publier, mardi 17 octobre, son tout premier rapport sur l'impact de l'offre de vélos partagés ou en location longue durée sur les modes de transport. Mené avec le soutien technique et financier de l'Agence de la transition écologique (Ademe), entre les mois de janvier et de mai 2023, celui-ci s'est appuyé sur un sondage auprès de 168 gestionnaires de services et de 4 571 usagers.
D'après leurs déclarations, près d'un abonné sur deux (49 %) à une location de vélo longue durée (VLD), de plusieurs semaines à plusieurs mois, et plus d'un quart (26 %) à une offre en libre-service (VLS) déclarent utiliser moins leur voiture. La part modale du vélo dans leurs déplacements augmenterait ainsi de plus d'un tiers, respectivement de 39 % et de 34 %, pour atteindre un quart des trajets, majoritairement complétés d'une séquence en transports en commun. Leurs motivations : leur conscience environnementale, la recherche de bien-être et de santé, mais également la rapidité et l'efficacité des deux-roues. Un usager sur dix renoncerait même à acheter une automobile ou envisagerait de se séparer de la sienne.
Un complément aux transports en commun
"L'intégration du vélo dans un système multimodal est aujourd'hui indispensable pour exploiter pleinement son potentiel et conquérir les trajets de moyennes et longues distances" Libre blanc « Vélo et transports collectifs »
« L'intégration du vélo dans un système multimodal est aujourd'hui indispensable pour exploiter pleinement son potentiel et conquérir les trajets de moyennes et longues distances », plaident d'ailleurs la Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB) et la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), dans un libre blanc commun, Vélo et transports collectifs, publié le même jour que cette étude. Grâce à sa « desserte fine des territoires » permettant des déplacements fluides et performants, porte-à-porte, dans un rayon de 2 à 10 kilomètres autour d'un arrêt de transport, le vélo constitue désormais une alternative crédible à la voiture, selon les deux fédérations.
À condition, souligne la FUB, « d'intégrer systématiquement le vélo aux pôles d'échanges et aux arrêts de transport », donc de « planifier les politiques de mobilité et les financements associés, pour opérer des choix structurants en matière d'infrastructures, de matériel, de billettique et de services ». Une approche déjà adoptée par plusieurs régions, comme la Bretagne et le Grand Est. L'attractivité des services diffère cependant selon le territoire concerné. Ainsi, selon l'étude de l'AAVP, le vélo en libre-service rencontre plus de succès dans la Métropole du Grand-Paris, où chaque véhicule effectue plus de 9 000 kilomètres par an en moyenne, contre 8 kilomètres par an dans une communauté de communes. Un vélo en location longue durée, en revanche, roule près de 1 400 kilomètres par an dans une communauté d'agglomération contre un millier de kilomètres dans le Grand-Paris et moins de 900 km dans les autres métropoles.
Des milliers de kilomètres au compteur
Le parc de vélos partagés en France se composait en 2022 de 133 000 véhicules, pour 940 000 abonnés. Ces derniers ont parcouru 270 00 kilomètres. Chaque vélo permettrait d'économiser 90 kilos de CO2 par an, 12 000 tonnes pour l'ensemble du parc.
Longue durée ou libre-service ?
Les profils des publics jouent également sur leurs choix de déplacement. Les femmes montrent notamment une préférence pour les offres en VLD. Aujourd'hui, elles représentent 62 % de leurs abonnés, contre 44 % des adeptes du VLS. Les VLD séduisent également plus fortement les employés, les professions intermédiaires et les retraités, tandis que les VLS attirent plutôt les étudiants et les catégories « CSP+ ». Pour un abonné sur deux (49 %), en tout cas, cet accès au vélo public aura été l'occasion de se remettre plus régulièrement à cet exercice. L'électrification de ce mode de déplacement n'est sans doute pas étrangère à ce succès : désormais 85 % du parc en VLD est à assistance électrique, au lieu de 11 % en 2015.
Tous modes confondus, les usagers des services de vélos partagés plébiscitent par ailleurs ces offres, jugées par les deux tiers d'entre eux plus économiques, mieux sécurisées face aux vols et plus pratiques que le vélo personnel, l'entretien n'étant plus de leur ressort. « Au vu de ces premiers résultats, le constat est sans appel, estime Nicolas Roussel, président de l'AAVP. L'accélération du report modal vers le vélo, donc la voie vers la démotorisation, passera en grande partie par ces services vélos, et les collectivités y jouent un rôle majeur. » D'autant plus que, pour ces dernières, le reste à charge par vélo demeure relativement modeste : 1 490 € par an en moyenne pour les VLS et 490 € pour les VLD, soit 0,98 € par habitant.
Des candidats sur listes d'attente
Selon le Diagnostic d'évaluation des services vélo publié par l'Ademe en septembre 2021, le déploiement des services publics de vélos en libre-service a augmenté de 89 % entre 2015 et 2020 et celui de la location longue durée de 86 %. Le succès de la location longue durée est tel que 40 % de ces services ont même été obligés de mettre des candidats sur une liste d'attente… Une étude qui tombe à point nommé pour alimenter les réflexions des autorités organisatrices de la mobilité (AOM), au moment où l'ex-ministre de l'Écologie, Barbara Pompili, missionnée par la Première ministre, rend son rapport sur les zones à faibles émissions (ZFE) et où certaines villes, comme Lille, Nice ou Agen, réduisent l'accès de leur centre-ville aux deux-roues. L'Association des acteurs du vélo public promet d'actualiser régulièrement cette étude « afin de mieux accompagner la dynamique du secteur ».
Nadia Gorbatko / actu-environnement