Le salon des Solutions
environnementales du Grand Est

Les Actualités

REPowerEU : les solutions de la Commission européenne pour se passer des énergies russes

19/05/2022

REPowerEU : les solutions de la Commission européenne pour se passer des énergies russes

Les énergies renouvelables devront atteindre 45 % de la capacité de production en 2030.     © hruiL

Afin d'aider les États membres à s'affranchir de leur dépendance vis-à-vis de la Russie, la Commission européenne présente aujourd'hui son plan REPowerEU, axé en partie sur les économies d'énergie et le développement des renouvelables.

C'est une mobilisation sans précédent en faveur de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables que propose, ce mercredi 18 juin, la Commission européenne, dans le cadre de son plan REPowerEU. Outre les mesures de stockage du gaz et de diversification de son approvisionnement, Bruxelles révèle, en effet, toute une série de nouvelles initiatives, censées assurer une réduction des consommations d'énergie de 13 % à l'horizon de 2030, au lieu des 9 % initialement prévus dans le paquet « Fit-for-55 ». Un objectif « atteignable », selon la Commission, pour peu que soient mobilisés tous les secteurs économiques (énergie, bâtiment ou transports), les régions, les villes et les citoyens eux-mêmes.

Efficacité dans tous les domaines

Télétravail, réduction de la vitesse sur les routes, covoiturage, amélioration des transports collectifs, baisse du chauffage… Également listés par l'Agence internationale de l'énergie (AIE), les leviers ne manquent pas. Afin d'inciter les ménages et les industriels à changer de comportement, la Commission encourage les États membres à lancer des campagnes de communication spéciales. Elle recommande également des mesures fiscales, telles que des taux de TVA réduits sur les systèmes de chauffage économes en énergie ou sur l'isolation des bâtiments. Marie Toussaint, eurodéputé du groupe des Verts-Alliance libre européenne, salue ces mesures, même si le texte aurait pu, selon elle, pousser jusqu'à 20 %. « C'est bien sur l'efficacité énergétique qu'il faut investir en premier », prône-t-elle. Directeur du centre énergie de l'Institut Jacques-Delors, Thomas Pellerin-Carlin approuve : « Pour sortir de leur dépendance à la Russie, les Européens doivent activer les leviers qu'ils contrôlent vraiment (…). Le tout en six mois, avant l'arrivée de l'hiver. »

Deux fois plus de solaire

Cumulant une capacité de 1 236 gigawatts (GW) en 2030, contre 511 aujourd'hui, les énergies renouvelables devront, quant à elles, atteindre 45 % du total à cette date, au lieu des 40 % préalablement envisagés par le paquet « Fit-for-55 ». Dans ce domaine, la Commission préconise une stratégie en deux temps. Rapide à développer, le solaire serait d'abord favorisé. En instaurant progressivement l'obligation légale d'installer des panneaux solaires sur les nouveaux bâtiments, publics, commerciaux et résidentiels, notamment, sa capacité pourrait doubler d'ici à 2025, pour totaliser 600 GW en 2030. La multiplication par deux du nombre des pompes à chaleur est également visée, ainsi que l'intégration de la géothermie et du solaire thermique dans les systèmes de chauffage urbains et collectifs. « Le maître-mot, c'est l'urgence, constate Adina Revol, porte-parole de la représentation de la Commission européenne en France. L'interruption des livraisons gazières en Bulgarie ou en Pologne montre à quel point il faut agir vite. »

L'intérêt supérieur valorisé

Pour sortir de leur dépendance à la Russie, les Européens doivent activer les leviers qu'ils contrôlent vraiment (…), le tout en six mois

 Thomas Pellerin-Carlin, directeur du centre énergie de l'Institut Jacques-Delors

 Plus longue à faire aboutir, la solution de l'éolien n'est pas pour autant mise de côté. Au contraire, la Commission envisage de publier une recommandation pour lutter contre la lenteur et la complexité des demandes d'autorisations. Le 13 juin, elle compte aussi réunir des experts et des représentants des États membres afin d'échanger sur les leviers à adopter, y compris celui de la participation citoyenne. L'institution prépare par ailleurs une modification ciblée de la directive sur les énergies renouvelables considérant ces dernières comme un « intérêt public supérieur ». Elle imagine également la mise en place par les États membres de zones de référence spéciales, dans les zones présentant des risques environnementaux moindres, assorties de procédures d'autorisation raccourcies et simplifiées. Côté hydrogène renouvelable, avec l'ambition d'en produire 10 millions de tonnes et d'en importer tout autant d'ici à 2030, REPowerEU insiste sur la nécessité de définir un cadre réglementaire et de normes pour cette molécule, ainsi que d'accélérer sur l'évaluation des projets PIIEC. Une centaine d'entre eux devraient être validés avant l'été. Quant au biométhane, il devrait voir sa production atteindre 35 milliards de mètre cubes d'ici à 2030, grâce à un plan d'action particulier, qui encouragera notamment la création d'une alliance industrielle dans ce secteur.

Une chaîne de valeur renforcée

Ces ambitions mettent en lumière l'ampleur du défi industriel à relever : fabrication d'électrolyseurs, de pompes à chaleur, de panneaux photovoltaïques, recherche sur la recyclabilité, amélioration des matériaux critiques… La Commission annonce donc le lancement d'une alliance européenne pour le solaire et encourage le développement de partenariats sur les chaînes de valeur, particulièrement dans le secteur des métaux et des résines. Elle soutiendra aussi les partenariats dans le domaine des compétences.

Enfin, dans le cadre de la diversification des approvisionnements en gaz ou en GNL et afin d'assurer un maillage suffisant du territoire, REPowerEU prévoit de soutenir l'adaptation des infrastructures d'acheminement ou de stockage du gaz, à hauteur de 10 milliards d'euros, au nord de l'Allemagne, en Europe centrale et orientale, notamment. Ce choix fait grincer des dents certaines ONG, comme ClientEarth, et le groupe des Verts au Parlement, qui craignent de gaspiller des investissements plus utiles ailleurs et d'enfermer l'Europe dans ce modèle gazier à dépasser. « La poursuite de l'expansion des combustibles fossiles n'est pas la solution, protestent les représentants de ClientEarth. L'introduction de plus de combustibles fossiles, y compris le gaz, ne contribuera pas à atténuer la crise énergétique assez rapidement pour empêcher les gens de souffrir au cours de l'hiver à venir. » La Commission, pour sa part, insiste sur le ciblage de ces investissements « limités » qui pourront par ailleurs servir ultérieurement pour l'hydrogène vert.

Des transformations structurelles profondes

Coût total de ces investissements : 210 milliards d'euros d'ici à 2027. Débattues lors de la réunion extraordinaire du Conseil européen, les 30 et 31 mai prochains, ces propositions devraient constituer le volet opérationnel des lignes directives présentées en mars dernier. Pour Adina Revol, porte-parole de la représentation de la Commission européenne en France, elles annoncent de véritables transformations structurelles pour 2027 à 2030. Elles devraient en effet rehausser les ambitions des plans climat des États membres, attendus en juin 2023. Elles pourraient également jouer un rôle dans les derniers ajustements du paquet « Fit-for-55 » consacré au combat climatique, prévus en juillet prochain, mais aussi dans les révisions en cours de la directive sur l'efficacité énergétique. À condition, selon Marie Toussaint, que le Conseil ne recule pas devant quelques mesures plus contraignantes, et sous réserve, selon Adina Revol, de faire jouer au maximum la solidarité entre les pays. « Aucun État ne peut relever le défi seul. L'évaluation et la planification des besoins, la définition des modalités à mettre en œuvre doivent se faire en commun pour rester réalisables et abordables », insiste-t-elle.

Nadia Gorbatko / www.actu-environnement.com

Annonce Publicitaire