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L'agrément des sites naturels de compensation va devenir plus facile

21/06/2024

L'agrément des sites naturels de compensation va devenir plus facile

Deux sites de compensation sont actuellement agréés, dont celui de Cossure dans les Bouches-du-Rhône.    © CDC Biodiversité

La loi Industrie verte a réformé le dispositif des sites naturels de compensation. Les textes réglementaires destinés à mettre en œuvre cette réforme et à faciliter les agréments sont soumis à la consultation du public.

« Favoriser la bonne mise en œuvre du dispositif "sites clés en main", par l'anticipation des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité. » Tel était l'objectif affiché dans l'exposé des motifs du projet de loi relatif à l'industrie verte. Cette loi, promulguée le 23 octobre 2023, a transformé les sites naturels de compensation (SNC) issus de la loi de reconquête de la biodiversité de 2016 en sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR). Les dispositions concernées sont codifiées aux articles L. 163-1-A et suivants du code de l'environnement (1) .

Le ministère de la Transition écologique a dévoilé, le 12 juin, dans le cadre d'une consultation publique (2) qui prendra fin le 3 juillet prochain, le dispositif réglementaire, constitué de deux décrets (dont l'un en Conseil d'État) et d'un arrêté ministériel, destiné à mettre en œuvre le nouveau dispositif.

Compensation par l'offre

La compensation des atteintes à la biodiversité, rappelle le ministère, peut intervenir selon deux modalités :

une compensation à la demande : « Le maître d'ouvrage entreprend (ou confie à un opérateur de compensation) l'élaboration, la mise en œuvre et le suivi de mesures compensatoires dimensionnées spécifiquement pour répondre aux impacts résiduels du projet qu'il porte » ;

une compensation par l'offre : « Le maître d'ouvrage s'acquitte de l'obligation de compensation des impacts résiduels de son projet via l'acquisition d'unités de compensation dans le cadre d'un site naturel de compensation (SNC) qui a accueilli une opération de restauration écologique de grande ampleur ».

L'objectif de la réforme est de modifier les modalités de la compensation par l'offre. Deux évolutions principales du dispositif sont affichées. D'une part, ouvrir les SNC à des opérations volontaires de restauration des milieux naturels menées par des entreprises et des collectivités. D'autre part, « mutualiser et anticiper » les mesures compensatoires. Ce deuxième objectif pose toutefois question car cette mutualisation et cette anticipation sont déjà possibles dans le dispositif actuel, comme le souligne d'ailleurs lui-même le Gouvernement dans l'étude d'impact du projet de loi Industrie verte : « Depuis la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, les mesures de compensation peuvent être également anticipées et mutualisées par la mise en place de "sites naturels de compensation" (SNC) ».

Il s'agit donc aussi, et surtout, de faciliter l'agrément de nouveaux sites de compensation. Jusqu'à l'agrément du site de Cros du Mouton à Sainte-Maxime (Var) au profit de CDC Biodiversité il y a dix jours, un seul site était en effet agréé, celui de Cossure (Bouches-du-Rhône) au profit du même opérateur de compensation. Le projet d'agrément d'un autre site, proposé par la société Biotope à Villeveyrac (Hérault), a été mis en consultation publique en février dernier en même temps que celui de Cros du Mouton. Mais il a reçu un avis défavorable du Conseil national de la protection de la nature (CNPN) le 28 février dernier et n'a pas été agréé.

Agrément confié au préfet de région

Afin de faciliter l'agrément, le projet de décret en Conseil d'État (3) prévoit de transférer la compétence du ministre de la Transition écologique aux préfets de région, avec une instruction qui sera réalisée par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal). Les décisions seront prises après avis du conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN) et non plus du Conseil national de la protection de la nature (CNPN). Le texte prévoit une règle de « silence vaut accord », dans le cas où le préfet ne se manifeste pas dans les six mois suivant la demande.

La loi Industrie verte a également assoupli les exigences de proximité du site de compensation par rapport au lieu où vont survenir les atteintes à la biodiversité, avec l'intégration de la notion de « proximité fonctionnelle » dans l'article L. 163-1 du code de l'environnement. Le projet de décret prévoit que les mesures de compensation seront mises en œuvre en priorité sur le site endommagé « ou, en tout état de cause, en proximité fonctionnelle avec celui-ci afin de garantir ses fonctionnalités de manière pérenne ».

Décrire la nature du gain écologique visé

Le projet de décret simple (4) , quant à lui, porte sur les modalités de délivrance de l'agrément, ainsi que sur les modalités de fonctionnement et de suivi des SNCRR. Il est complété par un projet d'arrêté ministériel (5) qui fixe les critères de pertinence écologique d'un SNCRR, en termes d'implantation du site, d'objectifs et d'actions de restauration et de renaturation, ainsi que d'entretien des gains écologiques et de suivi.

L'arrêté fixe le contenu du dossier de demande d'agrément. Celui-ci doit notamment décrire « la nature du gain écologique visé », en lieu et place des « types de mesures écologiques envisagées (…) qui permettent de justifier d'un gain écologique ».

Selon le projet de décret, les unités de compensation, de restauration ou de renaturation (UCRR) représentent « l'ensemble des gains écologiques attendus d'une ou plusieurs opérations de restauration écologique, de renaturation ou de développement d'éléments de biodiversité », qui doivent être maintenus pendant toute la période de validité de l'agrément (au moins trente ans).

Ces UCCR, précise le ministère de la Transition écologique, pourront :

  • être vendues sous forme de prestations de services à des maîtres d'ouvrage qui ont des obligations de compensation ;
  • être vendues à des personnes physiques ou morales qui souhaitent contribuer à la restauration de la biodiversité de manière volontaire (par exemple : politique RSE des entreprises, collectivités qui souhaitent préserver la qualité de leurs espaces naturels, assureurs qui souhaitent contribuer à la diminution des risques naturels) ;
  • être utilisées par le créateur du SNCRR lui-même (« l'opérateur ») pour contribuer à la restauration de la biodiversité de manière volontaire, ou pour répondre à ses propres obligations de compensation le cas échéant.

Commercialiser les unités de compensation dès l'obtention de l'agrément

Une évolution importante réside dans le calendrier de commercialisation des unités de compensation. Le texte actuellement en vigueur prévoit que les SNC doivent « permettre une mise en œuvre des mesures compensatoires (…) avant la mise en vente des unités de compensation correspondantes ». Le texte en consultation, en revanche, prévoit que les SNCRR « le cas échéant, permettent une mise en œuvre des mesures compensatoires (…) avant l'utilisation des UCRR ». L'opérateur pourra donc commercialiser les unités de compensation dès l'obtention de l'agrément sans attendre les premiers résultats des opérations de restauration prévues. « Les UCRR acquises ne pourront être revendues, et ne constitueront pas un marché secondaire », indique en revanche le ministère de la Transition écologique.

D'autres mesures destinées à développer le nombre de sites de compensation sont mises en œuvre. Comme le permet désormais la loi, des opérations réalisées au sein des SNCRR pourront donner lieu à l'attribution de crédits carbone au titre du label « bas carbone ». Ces opérations devront toutefois être distinctes des UCCR. Le texte prévoit par ailleurs une possibilité de transfert de l'agrément qui n'existait pas jusque-là. Si dans un délai de deux mois, le préfet n'a ni délivré de récépissé de la déclaration de transfert ni refusé celui-ci, le transfert est considéré comme autorisé.

D'autres mesures destinées à assouplir les contraintes liées à la compensation environnementale, en autorisant notamment des pertes nettes intermédiaires de biodiversité, étaient par ailleurs prévues par le Gouvernement à travers le projet de loi de simplification de la vie économique. Mais ce texte est passé aux oubliettes, en même temps que l'ensemble des autres textes législatifs en discussion, à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale par le président de la République.

1. Consulter les articles L. 163-1-A et suivants du code de l'environnement

2. Accéder à la consultation publique

3. Télécharger le projet de décret en Conseil d 'État

4. Télécharger le projet de décret simple

5. Télécharger le projet d'arrêté ministériel

Laurent Radisson / actu-environnement


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