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Classement RSE dans la presse : les entreprises poussées à se transformer, mais gare à la méthodologie

05/12/2020

Classement RSE dans la presse : les entreprises poussées à se transformer, mais gare à la méthodologie

Les classements des medias ont une grande influence, l'intégration de critères RSE pourrait-il permettre l'accélération de la transformation durable des entreprises ?    @Svetlana Kachurovskaia Lanpochka

Mi-novembre, deux grands magazines, Le Point et Challenges, ont dévoilé coup sur coup le "palmarès des entreprises responsables" et "les entreprises championnes du climat". Une première pour la presse française qui montre l’importance prise par le sujet et l’appétence du grand public pour les engagements environnementaux et sociaux des entreprises. Reste que les méthodologies doivent être solides pour garantir une saine compétition.

Le 12 novembre dernier, la Une du magazine économique Challenges interpelle : un bandeau met en avant "les entreprises championnes du climat", sur la base d’un nouveau classement maison. Le même jour, avec l’aide du même institut Statista, l’hebdomadaire Le Point sort son "palmarès des entreprises responsables". Une première dans la presse grand public et économique française.

Quelques jours plus tard, le sujet est sur la table du conseil d’administration du C3D, le collège des directeurs développement durable. Au-delà des têtes d’affiches et des queues de classement, le signal envoyé réjouit ces directeurs qui luttent depuis des années pour imposer ce sujet dans leur entreprise. Mais les méthodologies posent question. "Les palmarès RSE, course à l’échalote ou accélérateur d’engagement ?", s’interroge alors le président du C3D, Fabrice Bonnifet, dans une tribune publiée dans le journal La Croix.

"Au titre des bonnes nouvelles, cela prouve que le sujet intéresse de plus en plus médias, lecteurs et entreprises. Cela a un effet positif car les patrons les mieux classés vont se réjouir d’être dans le haut du classement, les autres vont convoquer leur direction RSE pour leur demander d’accélérer !", assure Fabrice Bonnifet, qui est aussi aux commandes de la stratégie développement durable du Groupe Bouygues.

Une grande influence sur la réputation des entreprises 

La publication de classement sur des thématiques RSE n’est pas nouvelle, mais jusqu’ici elle restait dans la sphère des professionnels, via les agences de conseil en réputation, en stratégie climat ou les agences de notation extra-financières. La puissance médiatique de la presse hebdomadaire touche au contraire des milliers de lecteurs et permet à ces classements d’avoir "une grande influence sur la réputation des entreprises", reconnaissent les managers.

C’est d’ailleurs en mettant en avant leur influence que Challenges a incité les entreprises à participer. La "grande résonance du palmarès suscitera l’attention de vos clients-consommateurs, récompensera le travail de vos collaborateurs et influera sur votre marque employeur", écrivait ainsi Vincent Beaufils, le directeur de la rédaction, dans un message adressé à leur intention.

Chez Maisons du monde, qui a fait de la RSE un enjeu de différenciation, l’argument a fait mouche. Et le résultat est à la hauteur des attentes puisque le distributeur se classe deuxième du classement Challenges. "Il faut rester humble par rapport à ces résultats mais c’est clairement un motif de fierté en interne, pour les équipes qui travaillent au quotidien sur ces questions, d’autant plus dans ce contexte de crise. Cela prouve que malgré les difficultés, on ne sacrifie pas notre engagement RSE. C'est notre force de résilience et un pilier de notre stratégie 2024", affirme Rémi Pierre Laprend, chef de projet RSE du distributeur.

Un tel rayonnement auprès du grand public joue aussi sur l’attraction des talents, de plus en plus en demande d’engagement des entreprises sur ces questions, et sur l’acte d’achat des consommateurs, confirme-t-il. À l’international, certains classements de magazines économiques référents font même autorité auprès des investisseurs responsables comme le Global 100 du magazine canadien Corporate Knights. Chaque année depuis son lancement en 2005, les entreprises qu’il distingue surperforment globalement par rapport aux indices boursiers classiques. 

Des méthodologies à améliorer

Cette influence rend d’autant plus cruciale la transparence et la rigueur de la méthodologie employée par ces classements. Pour ces premières versions, il manque en effet des critères réellement matériels, déclinés par secteur. Difficile en effet de juger la réalité des engagements avec 30% de la note basée sur la réputation des entreprises auprès de personnes sondées ou le nombre de pages du rapport RSE publié par les sociétés. Quant à la performance climat d'une entreprise, il faut une prise en compte des émissions induites en amont de la fabrication et en aval, via l'usage du produit.   

Pour vraiment agir en tant qu’accélérateur de transition, les méthodologies doivent donc être améliorées pour évaluer comment les engagements s'avèrent en ligne avec l'ampleur des défis environnementaux (comme le climat) et sociaux avec des trajectoires basées sur des validations scientifiques, estiment les experts RSE. C’est ce que demandent les étudiants du collectif Pour un réveil écologique ou le C3D qui souligne aussi l’importance d’élaborer des méthodologies avec des tiers de confiance, spécialistes de ces questions complexes. Sous peine de créer la confusion et in fine, de saper la crédibilité des engagements valorisés.

Béatrice Héraud @beatriceheraud / novethic.fr


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