Des panneaux plaqués aux murs des sous-sols récupèrent la chaleur

Inauguration d'une installation géothermique dans le parking du 53 avenue Philippe Auguste, fin février 2025, à Paris.    © Louise Allavoine / Paris Habitat

En toute discrétion, 145 panneaux géothermiques installés dans un parking couvrent 25 % des besoins en eau chaude sanitaire d’une résidence parisienne.

Et si la chaleur de la terre était récupérée directement depuis les parois de nos sous-sols ? C’est ce que propose la start-up Enerdrape, jeune pousse née en 2021 dans les laboratoires de l’école Polytechnique de Lausanne, grâce à ses panneaux dits géothermiques, installés dans le parking d’une résidence du XIe arrondissement parisien. Ciec, filiale d’Engie Solutions, y a placé 145 panneaux sur 145 m² pour alimenter 72 logements du bailleur Paris Habitat en eau chaude sanitaire (ECS). De 140 x 74 m de côté pour à peine 4 cm d’épaisseur, constitués d’une plaque d’aluminium et d’un circuit d’eau glycolée, ils sont plaqués contre les murs du parking, en contact direct, pour récupérer les calories des murs perpétuellement tempérés à 12 ou 15 °C, ensuite retransmises à une pompe à chaleur eau/eau de 25 kW. Une première en France.

20250227_Geothermie_Philippe_Auguste_©ALLAVOINE_05_HD© Louise Allavoine / Paris Habitat

Un chantier non invasif

« Nous avons repéré cette solution il y a plus d’un an, et nous avons souhaité l’expérimenter avec Paris Habitat, car nous sommes non seulement en charge de la maintenance de 30 000 de leurs logements collectifs, mais aussi parce que nous bénéficions de près de 40 ans de partenariat lors desquels nous avons déployé des innovations, comme les pompes à vapeur d’eau ou les systèmes de cogénération », commence Rémi Pujol Jacomi, directeur commercial de Ciec, qui se positionne comme exploitant de chauffage et froid collectif, mais aussi comme intégrateur de solutions innovantes et decarbonées. Il confie : « cela fait un moment que nous cherchons à réaliser de la géothermie dans Paris, mais nous sommes toujours confrontés à des difficultés en terme de faisabilité, de temps de travaux ou de coûts ».

Ici, la solution présente de gros avantages : cette installation, qui pourrait passer presque inaperçue, permet de capter le potentiel géothermique encore inexploité des environnements souterrains comme les parkings, tunnels ou métros en milieu urbain, soit des surfaces déjà creusées, sans forage. De facto, le chantier s’avère bien moins invasif et n’a demandé aucune démarche administrative complémentaire. Il a d’ailleurs permis le maintien de l’accès aux places pendant les travaux, démarrés en octobre pour une durée de seulement trois mois et un budget de 100 000 euros.

20250227_Geothermie_Philippe_Auguste_©ALLAVOINE_28_HD© Louise Allavoine / Paris Habitat

25 % des besoins en ECS couverts

L’installation génèrera 70 MWh chaque année, de quoi couvrir environ 25 % des besoins en eau chaude sanitaire des logements. Le reste sera complété par le gaz, la chaufferie ayant elle aussi été rénovée. « Sans ces panneaux d'un nouveau genre, nous aurions simplement optés pour une chaudière plus performante, car la résidence ne dispose pas d'un réseau de chaleur à proximité. Une géothermie traditionnelle ou des panneaux solaires auraient été compliqués à mettre en place, tout comme une Pac air/eau qui génère des nuisances sonores inacceptables en milieu urbain dense », argumente Cyrille Fabre, directeur d’exploitation chez Paris Habitat.

« Nous pourrions produire plus d’énergie si nous déployons davantage de panneaux, mais dans ses recommandations, Enerdrape rappelle l'importance de préserver la ressource sur le long terme », complète Jessica Gregoire, chargée d’étude chauffage pour le bailleur. En effet, avec la géothermie, la chaleur déplacée par conduction, finie par être retirée de son milieu. « Les études tiennent compte d'une quantité d’énergie maximale à prélever via ce système de façon à laisser le temps au renouvellement naturel », poursuit-elle.

20250227_Geothermie_Philippe_Auguste_©ALLAVOINE_08_HD© Louise Allavoine / Paris Habitat

Confortement du modèle

« Depuis sa mise en service début février, nous suivons et analysons les données afin d'établir de premiers retours d’expérience », indique Rémi Pujol Jacomi. Autant de données qui seront utiles à Enerdrape pour conforter leurs modèles sur le cycle d’une année entière. À l’avenir, d’autres installations similaires pourraient être déployées par Paris Habitat (qui possède un parc de 126 000 logements dans Paris et en proche banlieue, dont 90 000 en chauffage collectif) dans des configurations similaires, ainsi que par Ciec, qui cherche à nouer un partenariat d’exclusivité avec la start-up pour installer ces équipements, en logements comme en tertiaire. Jessica Gregoire émet aussi l’hypothèse du rafraichissement : avec l’effet saisonnier, nous pourrons aller chercher plus de calories en hiver si nous avons la certitude de les remettre dans le sol en été ».

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